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Avis sur texte : extrait de roman - Linka
L'auteur : Linka
Présentation du texte :
...Il s'agit d'un passage du premier tome de mon roman que je définirai comme un space-opéra sombre (je sais que la science fiction n'est pas votre style préféré, mais je n'ai pas pu résister.).Je ne suis pas certaine qu'il soit le plus représentatif de l'ensemble, mais il est difficile de choisir avec objectivité...
La porte s’ouvre sur la vaste salle de contrôle déserte, inondée par la lumière spectrale des galaxies que nous traversons, la plupart du temps sans même nous en apercevoir. Je reste un instant subjuguée par la beauté glacée et vertigineuse de l’espace, qui s’étire à l’infini à travers les hublots démesurés s'étalant le long des parois de métal, tout autour de moi. Les dizaines d’écrans de contrôle, qui ronronnent paisiblement, me renvoient un scintillement fantomatique et j’observe la danse saccadée des milliers de petits voyants lumineux qui envahissent le tableau de bord. Je distingue dans la pénombre, la silhouette immobile du capitaine, qui quitte la barre et descend les quelques marches qui nous séparent, afin de me rejoindre. L'irrégularité de sa démarche témoigne encore de ce qu'il vient de traverser. De sombres ecchymoses se dessinent sous sa mâchoire, et semblent s’étendre le long de sa nuque. Son corps le trahit, mais comme à l’ accoutumée, il ne laisse rien paraître. Je ne sais quelle improbable justification donner à l’acte irréparable que j’ai commis quelques heures auparavant. Je ne peux que le contempler en silence. Je tente de chasser en vain la désagréable sensation de culpabilité qui ronge mes nerfs et acquiert une ampleur incontrôlable. Il faut que je cesse de me mentir. Mon arrivée sur ce bâtiment a amorcé un engrenage infernal qu’il me faut interrompre. Je sens confusément au fond de moi que je ne suis pas étrangère aux risques inconsidérés qu'il a prit en se livrant aux humanoïdes. Mon entêtement permanent a fini par mener Zon aux portes de l’Arcadia, et des dizaines d’âmes se sont éteintes en raison des mes choix et de mes actes. Pourtant, Alfred va malgré tout mourir, tout cela n’aura rien changé à cette terrible fatalité. Et voilà que pour clore ce triste chapitre, j’ai organisé la fuite de notre plus fervent détracteur… Bon sang, mais comment continuer à porter le poids de cette succession d’erreurs ? Je dois mettre un terme à ce désastre, je dois réparer tout le mal qui a été fait.<script type= "text/javascript"> </script>
Je comprends, lorsque son regard se pose sur moi, que tout ressentiment à mon égard s’est déjà évaporé. Ne reste que cette communion étrange et inexplicable qui nous a mystérieusement unis depuis le début. Une fois de plus son extraordinaire charisme me pétrifie, et je sais que jamais je ne pourrai aimer plus passionnément… Mais je dois absolument renier tout ce que mon âme écorchée me crie en silence. Il faut que j’abandonne tout espoir et que j’aille au bout de cette décision, qui surnage au fond de mon âme en de longues vagues sinueuses et entêtantes, depuis que j‘ai de nouveau posé un pied sur ce bâtiment. Je dois plonger au fond de ce gouffre insondable qui n’attend que moi.
- Je pars, m’entends-je prononcer, sans bien y croire. Est-ce bien ma voix ? Suis-je vraiment parvenue à articuler ces deux mots fatidiques ? L’ éclair de surprise et d’incompréhension qui traverse son regard ne laissent aucun doute. Il me semble qu’il tente de déchiffrer mon âme, tandis que la solennité du silence qui nous entoure me donne la sensation de suffoquer. Il faut absolument que je trouve la force de continuer, et c‘est d‘une voix vacillante que je tente une pathétique argumentation.
- Il existe encore tant d’innocents, tant d’idéaux à défendre… Tant d’êtres vivants croient encore en toi, en ton courage et ta détermination, ta force, ta légende…
Mon cœur se noie. Je peux le voir battre à travers ma tunique tant il martèle ma poitrine avec violence. J’ai du mal à poursuivre, les mots s’étranglent dans ma gorge, mais les paroles de la femme qui fut sa mère me reviennent soudain en mémoire, comme pour me convaincre que je fais le bon choix.
- Tant qu’il y aura des hommes capables de sacrifier leur vie pour ne pas te trahir, tant que brille au fond des yeux de tes compagnons cette flamme confiante et pure, ce fantastique enthousiasme et ce désir de vaincre, de… vivre, tu n’auras pas le droit de faiblir.
Je suis en train de sceller mon destin, de briser ce qui reste de ma vie, mais je n’ai pas d’autre choix. Je le dois à la mémoire de tous nos compagnons, morts sous l’étendard de la liberté, convaincus que leurs sacrifices n’étaient pas vains. Je le dois à l’innocence et la sublime pureté des enfants qui survivent encore au sein de l’enfer que nous leur avons bâti. Je le dois à l’univers entier, qui se déchire et s’affronte dans un formidable entrelacs d‘espoirs et de morts… Je lève les yeux vers lui, consciente de la douleur et de la fragilité que je suis en cet instant incapable de dissimuler.<script type="text/javascript"> </script>
- Et je suis…ta faiblesse, dis-je finalement, dans un souffle.
Il ne réagit pas, se contente de m’observer sans un mot, une main posée sur son épée, tandis que de nouveau seul le doux ronronnement des machines s’élève dans la vaste salle, qui me semble soudain presque hostile. Je suis incapable de détacher mon regard du sien, et il semble une fois de plus lutter contre une multitude de sentiments contradictoires. Il esquisse un sourire d’une insondable tristesse, qui enflamme soudain mes yeux, et je ne peux réprimer une larme silencieuse. Il m’a accordé de découvrir sa vulnérabilité, et je lui retourne en plein visage. Comment pourrait-t-il ne pas m’en vouloir ?
- Il est vrai…que j’ai peur pour toi plus que pour tous les autres… , souffle-t-il sans me quitter des yeux.
Je frotte doucement mes épaules avec la paume de mes mains, comme pour m’assurer que je suis toujours cet être tangible, qui sacrifie tout ce pourquoi il vit encore.
- Trop de vies et d’espoirs sont en jeu… , fais-je , d’une voix brisée. Mes jambes vont se dérober tant l’émotion qui me submerge atteint son paroxysme. Je fixe le sol froid, laissant les mèches blondes de mes cheveux retomber en désordre , dissimulant mon expression, que je devine éperdue. Je tressaille lorsque sa voix s’élève dans un murmure , et son inflexion d’une équanimité contenue transperce mon coeur aussi sûrement que l’aurait fait une lame acérée.
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Tags : tant, u003cbr, voix, sans, yeux
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Commentaires
1Pascal BlondiauVendredi 3 Août 2007 à 10:29RépondreA vous aussi, félicitations pour avoir le courage d'exposer votre prose. Tout est déjà dit. Je pense que le mélange des genres est difficile.5FanSFJeudi 17 Novembre 2011 à 16:106FanSFJeudi 17 Novembre 2011 à 16:107BeaujeanJeudi 17 Novembre 2011 à 16:108edwigeJeudi 17 Novembre 2011 à 16:10Très bien écrit je pense, bien qu'un peu "lourd" à mon goût... Bravo et bon courage
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