• Brive, 3 jours de sexe et de folie furieuse

    Suite à mon petit sondage, où une majorité s'est clairement dessinée pour que je rende compte en ce lieu de mon périple à la foire du livre de Brive-la-Gaillarde, je tiens à présent mon engagement (et ne félicite pas, au passage, tous ces gens qui pensaient -honte à eux - que Brive avait été rayée de la carte lors de la Seconde Guerre mondiale).
    Autant l'avouer tout de suite, le titre de cet article, s'il a pu éventuellement servir de cri de ralliement à quelques participants, ne présente que peu d'analogie avec ma réalité à moi (si ce n'est peut-être, rayon "folie furieuse", les 15 minutes durant lesquelles, dans la chambre d'hôtel, je me suis escrimé avec ma télécommande pour trouver Canal + ).
    Alors pourquoi un titre aussi fanfaron qu'éloigné de la réalité ? Tout simplement pour générer un max de visite et, par voie synchrone de conséquence, un max de com. Car si ces trois jours m'ont apporté un enseignement, c'est qu'il faut se montrer prêt à tout pour arriver à ses fins…
    Mais ne grillons pas les étapes, et prenons plutôt les choses là où elles ont débuté, c'est-à-dire à la gare d'Austerlitz.
    Persuadé comme d'habitude d'être terriblement en retard, j'arrive rougeaud et essoufflé aux abords du quai 21 où le fameux "train du livre" attend patiemment sa cargaison d'auteurs parisiens en tout genre. Je ne prête qu'une attention distraite à la cinquantaine de quidams occupés à discuter un verre de café dans une main et un croissant dans l'autre tout en battant de la semelle le sol bétonné, pour consacrer toute mon énergie à trouver une place assise.
    Je parcours donc les wagons déjà bien remplis d'individus plutôt volubiles et manifestement ravis de faire partie du voyage. Las, les rares tables libres sont toutes réservées, et mon côté optimiste prenant toujours le dessus dans ce genre de situation, je m'imagine déjà passer le voyage coincé à l'intersection de deux wagons, abrutis par le bruit des roues sur le ballaste et le claquement incessant de la porte des toilettes délivrant au passage son lot d'odeurs putrides. A force d'arpenter les allées, je finis toutefois par tomber sur une tablée pour ainsi dire déserte, à l'exception d'une place, occupée par un homme encravaté, aux allures affables de voyageurs de commerce. Après avoir reçu une courtoise bénédiction, je m'installe enfin. Quelques secondes plus tard, les deux derniers sièges sont pris d'assaut par deux dames qui, à peine le manteau quitté, comment à discuter entre elles. Le train s'ébranle finalement et bientôt le spectacle grisâtre de la banlieue parisienne exhibe ses reliefs puissamment sensuels sous mes yeux encore rougis de sommeil.
    Nous roulons depuis une petite demi-heure lorsqu'on nous propose un apéritif. Vin de figue ou vin de noix, tout cela n'est pas pour me déplaire, peu importe l'heure, et je m'empresse d'accepter le gorgeon. Mes trois compagnons de table déclinent pour leur part, et je me retrouve à siroter mon verre avec l'impression tenace d'un alcoolique anonyme venant de faire son outing. Dans la foulée, on nous apporte l'entrée. Je ne vous ferai pas le détail du menu, parce qu'à dire vrai, on s'en fiche un peu, vu que nous sommes sur un blog littéraire (notons juste au passage que le choux farci aux ris de veau et au foie gras, couplé au doux balancement du train, a un peu de mal à passer).
    Enhardi par mon vin de figue et un ou deux verres de bordeaux, je commence à lever le nez et à observer avec mon acuité légendaire les gens aux alentours. Certaines têtes me disent vaguement quelque chose, mais quoi exactement ? Heureusement, le "Guide de la 27e foire du livre de Brive" sorte de trombinoscope who's who est là pour me renseigner. Et quelle n'est pas ma stupéfaction de constater que ma modeste personne se trouve à quelques mètres de KENZA !!! Oui... Kenza... Vous ne voyez pas ? Le Loft... Mais enfin, si : le LOFT !!!! Si vous ne voyez vraiment pas, c'est que vous le faites exprès ou que vous n'y connaissez vraiment rien en littérature contemporaine (comme Kenza, quoi). Un peu plus loin, se trouve Denis Tillinac, un peu plus loin encore Jean-Louis Debré, très rock'n'roll avec son djin informe de jardinier du dimanche, porte-feuille en cuir marron dépassant de la poche arrière (ne me demandez pas ce qu’il a écrit…). Et puis juste à côté de moi, Bertina Heinrichs, auteur de "La joueuse d'échec". Pas de doute, on est bien dans le "train du livre" également appelé "le train du cholestérol" par ses contempteurs/détracteurs, on ne sait pas trop. Sans doute dans l'idée de tuer un peu du temps qui nous est imparti, le monsieur affable et encravaté juste devant moi décide d'engager la conversation. Il se trouve qu'il est l'éditeur de Kenza, la George Sand du vingt-et-unième millénaire citée plus haut, mais aussi de Jacques Pradel, qui vient de sortir "Saint-Exupéry, l'ultime secret ". Je m'étonne : quel rapport entre l'homme de la supercherie de Roswell (entre autres casseroles médiatiques) et l'aviateur français ? Réponse : Pradel aime beaucoup l'aviation, d'ailleurs il a son brevet de pilote de coucou et... voilà, quoi. Oui, mais quand même, mener une enquête pour retrouver le pilote de la luftwaffe qui a abattu Saint-Exupéry durant la guerre, c'est un sacré travail de fourmi, ça prend un temps fou non ? Oui, et c'est pour cela que le livre est cosigné avec un journaliste, Luc Vanrell. Pressentant que l'homme cherche à m'embobiner avec de vaines ratiocinations, je m'empare de la bouteille de Bordeaux disposée devant nous et menace de lui fendre le crâne avec s'il ne passe pas aux aveux. Il hésite, je le menace alors de lui commander une seconde part de choux farcis aux ris de veau et au foie gras, il abdique sans condition : en fait, le nom de Jacques Pradel sur une couverture est bien plus vendeur que celui d'un journaliste ignoré du grand public, aussi talentueux soit-il. Et puis signer un contrat avec l'ex-animateur télé, s'est s'assurer d'un service après-vente de haute volé, avec passage à la télé/radio, articles dans les journaux et tutti quanti. Non pas que l'homme fascine à ce point les médias: il en fait tout simplement partie depuis plusieurs décennies, et à ce titre, leurs portes lui sont grandes ouvertes...
    Pour être vraiment juste, on se doutait un peu de ce genre de pratique. Cela étant, en avoir la confirmation fait toujours plaisir.
    Mais tous ces bavardages m'ont presque fait oublier une des principales raisons qui ont motivé mon déplacement à Brive : rencontrer Frédéric Beigbeider pour qu'il puisse enfin me dire de vive voix tout le bien qu'il pense de moi. L'envie combinée de griller une cigarette et de satisfaire quelque besoin naturel me donne l'occasion toute trouvée pour partir à sa recherche. Un wagon... deux wagons... toujours pas de Frédo... Qu'à cela ne tienne, je m'arrête entre deux pour satisfaire mon besoin de fumée. Tout en allumant mon clope j'avise à deux pas un grand gaillard d'environ 195 centimètres : c'est Jean Teulé. Je lui fais aussitôt part de mon admiration pour son album de bande dessinée/reportage photo "Gens de France" auquel l'émission Streap Tease a tout piqué. Le bonhomme est très simple et gentil, il pourrait pourtant avoir la grosse tête avec la palanquée de bouquin qu'il vend depuis quelques années, mais non, il discute gentiment et me demande même la raison de ma présence dans ce train. Je lui parle de "Comment devenir", il fait "Ah oui ! Ah oui !" comme s'il l'avait lu, ce qui fait toujours plaisir même si d'évidence tout cela ne lui dit absolument rien. Et puis il ajoute : "C'est la première fois que vous prenez le train du cholestérol, alors ?" Et en désignant la drôle de cigarette qu'il tient à la main : "C'est aussi le train du pétard, parfois !". Vraiment sympathique.
    Mais tout cela ne me dit pas où est Frédéric Beigbeider...
    Je retourne à ma place. Le temps passe gentiment, et le haut parleur finit par annoncer une arrivée imminente en gare de Brive. Les choses sérieuses vont vraiment commencer...

     

    Suite au prochain billet.


    Où te caches-tu, mon Frédo ?

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  • Commentaires

    1
    Mercredi 12 Novembre 2008 à 22:40
    Aude
    Et Jean d'Ormesson, BHL, et les autres ils étaient là? Et Catherine?
    2
    Mercredi 12 Novembre 2008 à 22:49
    Pffftt...
    Et bien...pas de sexe avec l'ancienne du loft, pas de Fred, un repas vomitif, une pose clope et du badinage avec un géant...faites bien attention AC les com seront bientôt en méga chute...5...4...3...2...1...ZERO!!???!! bon allez je recopie le code et j'envoie...ça fera tjs 2 com pour ce fabulous billet et moi j'di : c plus k'honorable pour un train ki rouleré vers une ville fantôme, disparue depuis la seconde guerre mondiale...
    3
    Jeudi 13 Novembre 2008 à 08:55
    louis
    Alors là, toujours la grande classe ! Attirer le chaland avec le mot sexe pour nous parler d'un train. Trop fort. Mais j'attends la suite avec impatience... vous connaissant, les écrits coquins ne sauraient tarder. (Sinon, ça va chier!!!) Amicalement PS.A quand un salon avec les éditions Chabossot ? RPS. Je monte à Paris quelques jours après Noël !!!
    4
    Jeudi 13 Novembre 2008 à 10:28
    Pffftt...
    Bien certain ke nan nan v'z'êtes pas le moins découragé...j'parie ke c une stratégie marketing pour k'on en ai l'ô à la bouche encore plus...kel p'ti malin vous êtes hein kan même? :) bon ben o taf maintenant!
    5
    Seb
    Jeudi 13 Novembre 2008 à 12:16
    Seb
    On peut dire que vous savez vous y prendre pour faire naître la jalousie ! Le même week-end, j'étais au salon du livre de Lyon. Comme j'habite tout près, je m'y suis rendu en bus (eh oui, je suis aussi capable de raconter ma vie sur le blog des autres) et aucun contrôleur des Transports en Commun Lyonnais ne m'a proposé une platrée de ris de veau ou un verre de rouge. Ni ne m'a parlé des oeuvres de Jacques Pradel, d'ailleurs. Finalement, j'ai peut-être bien fait d'aller à Lyon plutôt qu'à Brive.
    6
    FG l
    Jeudi 17 Novembre 2011 à 16:09
    FG						
						
			l
    Non on ne se connaît pas... enfin si moi je vous ai vaguement vu à Brive... mais ne revenons pas sur cet épisode... Pourquoi le dictionnaire ? Dans votre réponse du 15/11 vous indiquiez que ma flatterie était "emprunte" d'ironie... et fidèle à mon caractère incisif, peu indulgent... j'en passe et des pires, j'ai voulu, habilement, vous proposer les différentes facettes du mot emp... perdu...
    7
    FG l
    Jeudi 17 Novembre 2011 à 16:09
    FG						
						
			l
    METAPHORE ! Vous êtes lourd ... ou muffle ... ! Les corps d'albâtre... opalescents, comme une porcelaine de ... Limoges... Les femmes quoi ! A propos du pont musique littérature, je sors du dernier spectacle de Jacques Higelin... atypique, bourré d'erreurs, de fausses notes mais bouillonnant de poésie, de créativité... Quand à mon ironie si elle emprunte souvent des chemins ornés de cactus, elle reste empreinte de tendresse... ! ... et vous vous devriez emprunter un dictionnaire ! Ca vous calme ça comme flatterie ? Les couchers tardifs ... ? Mais jeune homme, vous les accumulez aujourd'hui... ! A mon âge, on n'a plus rien à perdre, ce qui devait s'écrouler l'a fait et ce qui tiendra jusqu'au bout est inaltérable... ! Mes 50 piges approchent et plus l'automne s'affiche plus les feuilles deviennent chatoyantes... alors... espoir !
    8
    FG l
    Jeudi 17 Novembre 2011 à 16:09
    FG						
						
			l
    Quel dommage ! Mais cessez donc de regretter, l'avenir est devant nous... enfin devant vous, parce que les femmes vieillissent tellement plus vite que les hommes ! (allez les filles, bougez-vous et hurlez votre révolte !). Se reposer sur votre stand ? Heureusement que mes copines et moi-même n'avont pas propulsé nos corps d'albâtre sur votre tas de livres... vous auriez vu ce qu'épuisement veut dire... Je viens de sortir avec délice dans un merveilleux concert de Rokia Traoré : créative, vivante, festive, grave et fragile, une voix de blues dans un corps de liane... Du genre à inspirer les écrivains... ! Pourquoi les ponts sont-ils si rares ? 10 dédicaces... ! Pas mal pour Brive, félicitations... ma mère m'a toujours dit que la flatterie marchait toujours avec les hommes ! Allez 2h du matin, je vais plonger moi aussi dans Nathalie Sarraute : Enfances...
    9
    FG l
    Jeudi 17 Novembre 2011 à 16:09
    FG						
						
			l
    Allez hop (non, calmez-vous !), une salade au boulot et un p'tit coup d'oeil sur votre site... J'adore littéralement votre description de Brive et j'attends avec impatience la suite de vos sublimes aventures... pour ce que j'en ai vu en passant sur votre stand vous étiez à fond la caisse ! Pour la langue... ciel ! Mais vous n'avez donc jamais été petit ? Jamais fait un super difficile devoir de math ? Jamais tiré la langue de concentration et de souffrance mélangées ? Mais, qu'alliez-vous imaginer... ? Le rouge me monte au front ! Je parlais de dédicace, seulement de dédicace, vous l'aurez compris sans doute ! ... Mais, si je comprends bien... vous ne seriez pas passé à l'acte... à Brive ?? Pas étonnant que vous soyiez ronchon !
    10
    FG l
    Jeudi 17 Novembre 2011 à 16:09
    FG						
						
			l
    Excellent ! Mais passez donc à l'acte ! L'avez-vous fait à Brive ? Et si vous l'avez fait y avez-vous pris du plaisir ? Main droite ou main gauche ? et la langue, passant doucement entre les dents pour favoriser la concentration ? et votre partenaire a-t-elle râlé longuement ou bien muette de plaisir a-t-elle tendu une main tremblante pour saisir.... Aaaaaahhhh ! Mmmmmhn ces séances de dédicaces !
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    11
    victoria
    Jeudi 17 Novembre 2011 à 16:09
    victoria
    Je pars au salon internationale de la piscine à Lyon la semaine prochaine (oui je sais c'est moins classe que le salon du livre à Brives : pas de fredo ni foie gras ni vin de figue !!!) et je pensais cher Aloysius vous piquer votre titre pour le compte rendu que je dois effectuer à mon retour. Ce titrre est fabuleux....tellement accrocheur ! toutefois j'attends de vous lire avec impatience car vous êtes un sacré vénard 3 jours de sexe dans un contexe aussi sérieux que le salon du livre...vous êtes un vrai coquin chanceux ou bien ?
    12
    taupe
    Jeudi 17 Novembre 2011 à 16:09
    taupe
    Mais vous restez dans le floue sur ce qui nous passionne tous : Avez vous vue les fameuses les bottes d'oignons?
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