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LA REDACTION - 2) La question du style
La France est une vieille nation de littérature qui s’est forgée au cours des siècles une image mythique de la création littéraire reposant avant tout sur le don, l’inspiration. En conséquence, tout ce qui touche à la technique paraît un peu suspect : elle ne servirait à rien, si ce n’est à étouffer l’élan créateur du romancier en lui imposant des cadres strictes de narration. Résultat, bon nombre d’apprentis écrivains se poste devant leur page blanche et se lance dans une écriture quasi automatique sans autre forme de préparation. La simple vue des pages qui se noircissent et s’amoncellent suffit à leur bonheur ; la preuve est là : il ont le don, ils sont écrivains. A la lecture, on s’en doute, le résultat est loin d’être aussi enthousiasmant.
Autre particularité française, cette tendance à tout miser sur le style. Combien de fois n’a-t-on pas entendu cette sentence sans appel qui suffit à elle seule à vouer un roman au gémonies : « Ca n’a aucun style ». Pourtant on porte le style aux nues sans savoir précisément ce qui se cache derrière un concept en définitif assez flou.
Pour tenter une approche simple et claire du problème, faisons appel à deux figures de la littérature française, aussi imposantes que diamétralement opposées : Proust et Céline. Prenez au hasard une page de « la recherche », puis de « Rigodon » : l’évidence saute aux yeux : chacun possède un style qui lui est propre et il faudrait être aveugle pour les confondre. A l’un les longues phrases sinueuses qui suivent les méandres de la pensée, à l’autre les phrases sèches et courtes ponctuées des fameux « trois petits points ». Très bien. Mais entre les extrêmes que représentent ces deux monuments, qu’en est-il ? Car comme le disait Céline : « un style, il y en a un par siècle, tout au plus ». Comment font les autres pour définir leur musique propre ? Eh bien en réalité, c’est très difficile et mieux vaut ne pas chercher à jouer les novateurs dans ce domaine. Rester humble, avant tout.
Pour se consoler, vous pourrez toujours vous dire que, quoiqu’on en pense, l’absence de style est un style en soi.
Prenons le cas de Michel Houellebecq pour poursuivre notre raisonnement.
Parmi les nombreux arguments utilisés par ses détracteurs (critiques littéraires pour la plupart), revient souvent celui du style, ou plutôt du manque de style qui handicaperait ses romans. Mais à quel style mythique font-ils référence pour asseoir leur accusation ? Impossible à savoir, simplement parce qu’ils présupposent que tout le monde sait ce qu’est le style (ou le bon style, car l’adjectif bon est sous entendu. Le mauvais style étant « pas de style du tout »).
En étudiant un peu la production française de ces dernières années (et bien au-delà) il est possible de dresser un portrait robot de ce fameux style qu’il serait de bon ton de maîtriser afin d’écrire des choses dignes d’être lues.
Pour être précis il se subdivise en deux catégories qui peuvent parfois se mêler avec plus ou moins de bonheur :
Le style dit « officiel » et le style dit « expérimental ».
Tags : style, bon, bien, cas, autre
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Commentaires
1Divine_NaiveJeudi 23 Avril 2009 à 13:47Répondre2AbigaelJeudi 17 Novembre 2011 à 16:113VéroniqueJeudi 17 Novembre 2011 à 16:11
Et si l'on devait comparer l'écriture d'un roman à un autre art, cela serait à celui de la peinture : l'artiste est devant sa toile ou bien sa feuille blanche ; il commence à investir l'espace peu importe "l'angle d'attaque". Il travaille les formes, les couleurs en fonction de son émotion, de sa sensibilité et de procédés qui n'appartiennent qu'à lui-même (son style). En un instant, il peut, s'il le veut, transformer un paysage enneigé en touches printannières.
Chaque artiste a ce pouvoir sur la matière.
Ainsi tout écrivain sur son roman...4Marc LévyJeudi 17 Novembre 2011 à 16:11Je rappelle que je n'ai aucun style (mais j'ai remporté le concours du SSP, Style Super Plat) et que je vends à fond les manettes.
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