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Socrate est né 1534 ans avant les jeux olympiques d'Athènes, au même endroit. Son père était sculpteur, mais on ignore ce qu'il sculptait exactement. Quant à sa mère, elle exerçait la profession d'infirmière, mais d'après les documents que l'on possède sur les pratiques médicales de l'époque, elle aurait eu du mal à décrocher un rôle dans "Urgences". A noter qu'elle sculptait elle aussi, à ses moments perdus, ce qui laisse à penser que c'était une infirmière très libérale.
L'oracle de Delphes, un type qui se cachait derrière une statue et racontait n'importe quoi en échange d’un sandwich et d’un coup de rouge, déclare un jour que Socrate est le plus sage des hommes. Stupeur de l'intéressé qui commence par dire: "OOOOh l'autre! Mais non pas du tout!" puis qui réfléchit un peu et finit par déclarer: "Je ne sais rien de plus que les autres hommes, si ce n'est qu'ils croient savoir quelque chose et que je sais que je ne sais rien". Ca peut paraître compliqué comme ça, mais en lisant lentement, on finit par comprendre.
Preuve que ce n'est pas si difficile : Jean Gabin lui-même a mis la pensée de Socrate en musique avec son fameux "Maintenant je sais" dont il écoulera pas moins de 500 000 exemplaires en 1974, distilant ainsi les oreilles encore tendre des baby-boomer la bonne parole socratique.Jean Gabin, un Socrate sans la barbe
Mais reprenons...
Fort de son savoir (c’est-à-dire: rien), Socrate commence, avec un courage qu'il faut saluer, à enseigner aux hommes leur ignorance. Ainsi, il va nu-pieds dans les rues d'Athènes, habillé comme un malpropre, pas rasé, pas lavé, tentant de convaincre tout un chacun qu'il ne sait rien du tout. Comment s'étonner après cela que les enfants lui lance des pierres ?
Au début on le laisse faire, car on le prend un peu en pitié. Mais peu à peu des bandes de jeunes désoeuvrés commencent à s'intéresser à son enseignement, d'autant qu'il ne nécessite que très peu de facultés intellectuelles. (Socrate: "Les gars, faut savoir un truc, c'est que vous savez rien...", les gars: "Ouaiiiiiis!")
Arrive ce qu'il devait arriver: excédé par les bruits de mobylette qui pétaradent dans les rues endormies jusqu'à plus d'heure, les Athéniens se plaignent, et le parti démocratique en profite pour l'accuser de pervertir la jeunesse. En 399, ce qui devait arriver arriva :Socrate est condamné à boire la ciguë. Au début, il n'est pas contre car il est persuadé qu'il s'agit d'une nouvelle boisson du genre "smart drink" dont raffole tant les jeunes. Il déchante lorsqu'on lui apprend que c'est en réalité du poison, destiné à le faire mourir dans d'épouvantables souffrances.
Face à son manque de coopération, la police athénienne menace de lui arracher les poils de sa barbe un par un s'il n'avale pas le liquide sur le champ. Un policier, plus gentil que les autres, lui propose de lui pincer le nez, car la ciguë sent très mauvais.
Socrate cesse donc de chouiner, boit le poison et meurt.
Le plus beau est que notre philosophe, durant sa longue vie, ne s'est pas donné la peine d'écrire une seule ligne. Du coup, ses propos proviennent exclusivement du bouche à oreille, de vagues "on dit" et de cancans athéniens, ce qui laisse un doute sur la véracité de leur contenu.
Si ça se trouve, il n'a pas dit un mot de tout ce qu'on a rapporté. Peut-être qu'il a seulement dit: "Je sais tout" ou "Foutez-moi la paix avec vos âneries!" ou "J'adore les carottes rapées avec un filet de citron".
On ne connaîtra jamais la vérité.Heureusement, de nos jours, un tel malentendu ne pourrait plus arriver, tout simplement parce que les philosophes sont devenus plus malins. Prenons l’exemple du plus prestigieux d’entre eux, Bernard Henri Lévy. Bernard Henry, convaincu que sa pensée constitue un indispensable rouage à la bonne marche du monde, note absolument tout ce qu’il dit dans de petits carnets qui ne le quittent jamais. Puis, une fois l’an, il rassemble le tout dans un pavé au titre abscons, et s’en va visiter les plateaux de télé. C’est ce qui assoit définitivement la suprématie de Bernard Henri sur ce pauvre Socrate. Sans compter que BHL est bien mieux coiffé et habillé.
Socrate, de sa vie, n'a jamais refusé un apéro
Biographie écrite en 2006, remaniée en 2011.
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Bonjour Alysious,
Jé 9 ans et je voudré écrire mes mémoire mais seulemen jé un probléme parceke je sé pa tro quoi raconté parce que il mé pas arivé tro gran chose dans la vie pour l’instan. Alo commen je pouré fair parce que je veu que mon livre soi gros un peu comme un haripoter et intéressan à lire aussi. Mon but ça serai de ramassé assez d’argent pour macheté une mini moto, et aussi de passé chez coué parce que je le trouve rigolo, et aussi que les filles elle arréte de se moqué de moi parce que j’ai un appareil et dé lunettes avec une monture de la sécurité sossial, tu sai, toute épaisse et pas joli.
Alor commen je peu fair Alysious ?
Ton ami Jérémy
Cher Jérémy,
La problématique que vous avez la gentillesse de m’exposer est intéressante à plus d’un égard. Vous me faites penser, toute proportion gardée, à cet homme atteint par la maladie d’Alzheimer qui avait décidé d’écrire ses mémoires, et qui ne se souvenait jamais de l’endroit où il avait rangé son petit cahier…
Tout bien réfléchi, et même en gardant les proportions, ces deux cas n’ont strictement rien à voir.
En réalité, vous ne me faites penser à rien, et je suis pour l’heure bien embarrassé pour vous répondre. Cependant, je peux toujours essayer de m’y astreindre, en considérant votre demande comme un défit insensé que m’auraient envoyé les Dieux (je suis polythéiste. La religion est comme le loto, plus on joue de numéros plus on a de chance de gagner).
Autant vous tenir dès à présent un langage de vérité : votre projet, plein d’ambition et de noblesse (cette histoire de mini-moto m’a je l’avoue émue jusqu’aux larmes) recèle cependant quelques embûches qu’il vous faudra surmonter. Certes, malgré votre jeune âge, on sent entre vos lignes souffler le zéphyr d’un style fort et éminemment personnel, qui fait parfois penser à votre prestigieux ainé Martien Defalvard. Mais, ami Jérémy, sachez que cela ne suffit pas toujours. En effet, que serait un meunier virtuose sans grains à moudre dans son moulin ? Le top des plombiers chauffagiste sans sa caisse à outils ? Le plus adorable des chatons sans ses grands yeux étonnés ? Des inutiles, des bons à rien, des impuissants, mon petit Jéré, ni plus ni moins. Et on ne peut pas dire, avec vos 9 petites années de présence ici bas, que vous vous facilitiez la tâche. Inutile de se voiler la face, vous ne disposez en l’état d’à peine plus de matière qu’un finaliste de Secret story atteint de sénilité précoce. La seule solution consisterait à étirer le récit de la moindre de vos journées au delà du raisonnable, en utilisant des phrases très longues bourrées d’adjectifs inutiles et d’adverbes parfaitement superflus. Au risque cependant d’indisposer le lecteur qui risque de trouver un peu longuette cette description sur 25 pages du garage playmobil que vous avez reçu à Noël 2008, ou encore ce chapitre interminable consacré à la fête de fin d’année de l’école Marcel Cachin en 2009. Mais c’est à ce prix que vous atteindrez le nombre de pages convoité. Allez, mon petit Jéré, au travail, il n’y a pas une seconde à perdre si vous voulez être prêt pour le Goncourt 2022 !
Je vous embrasse et vous souhaite un excellent Noël.Illustration du chapitre XXVI des "Mémoires de Jérémy"
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Voici une photo trouvée sur Facebook, précisément sur la page de Rémy Elkoubi (je le cite, car il s’agit d’un ami d’une amie, que par ailleurs j’aurai bien du mal à identifier si d’aventure je la croisais dans la rue, mais bon… vous connaissez le principe de FB…).
L’image montre l’un de ces petits cartons que l’on voit fleurir de plus en plus sur les étals des librairies branchées et qui, en quelques lignes, exposent l’avis du maître des lieux ou de l’un de ses sbires. En général, vu l’étroitesse de la surface allouée, cela se limite à « Haletant de la première à la dernière ligne. Un fascinant chef-d’œuvre qu’il faut absolument avoir lu » (sous entendu : « si vous ne voulez pas passez pour le dernier des ignares dans le prochain dîner en ville »). Mais là, on a affaire à autre chose. Le libraire n’a pas aimé le recueil de nouvelle de Viviane Forrester, et il l’écrit, en grosses lettres bien rondes, et avec un certain sens de l’humour, il faut le reconnaître.
Évidemment, cette pratique peut interpeller les esprits les plus cartésiens d’entre nous. Que dirait-on en effet d’un boucher qui annoncerait à ses clients : « Ne prenez pas de rumsteck, il est dur comme de la pierre, et pas plus tard que ce matin j’ai vu des asticots en sortir » ? Ou d’un vendeur de chez Darty qui déconseillerait solennellement une télé sous prétexte que ses couleurs bavent et que l’écran fond au bout de trois semaines ? De toute évidence, il s’agit d’un comportement suicidaire et anti commercial, que notre libraire bravache a ici adopté.
Pour ma part, et au-delà du fait qu’il contribue à scier la branche sur laquelle il est assis, je trouve l’attitude de ce libraire parfaitement réjouissante, à l’heure où la promotion à outrance dicte sa loi sur tous les plateaux télé ("le Grand journal"... Aïe aïe aïe...) et dans bien des journaux (le nouvel obs, hou là là !). Le bonhomme n’a pas aimé « Dans la fureur glaciale », il l’écrit, il l’assume, et le plus beau, c’est que ça ne l’empêche pas de vendre le bouquin. Et quand on connaît la politique de diffusion de Gallimard, particulièrement autoritaire (en gros, les librairies n’ont pas vraiment le choix : elles doivent prendre au minimum quelques exemplaires de la production Gallimard qui vient de sortir, si elles veulent continuer à accéder à l’ensemble du catalogue), tout ça ne manque ni de piquant, ni de panache !
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